Huissiers de justice : La Chambre fait son ménage

Par | Mutations
- 01-Dec-2008 - 08h30   56104                      
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Maître Alain Ngongang prend la tête du Comité directeur pour les trois prochaines années.
Le chahut qui a caractérisé l'hôtel Mont Febe jeudi et vendredi derniers exhalait une volonté de changement. Dans ce brouhaha indicible venu réveiller ce sommet de la capitale de son calme habituel, les huissiers de justice reconnaissables de par leurs badges, crachaient du venin quant à leurs conditions de travail qui selon la plupart sont "exécrables". Aussi bien dans les jardins, salons que dans le grand hall et dans la salle des travaux, ces professionnels du droit n'avaient qu'une seule détermination : en finir avec le comité directeur sortant. Dans leur colère, ils reprochent à l'équipe de Polycarpe Dimene Yomba son "inefficacité" et sa "complaisance vis-à-vis de la tutelle" depuis son entrée en fonction en 2002. Résultat des courses, "les huissiers de justice du Cameroun ont tiré le diable par la queue depuis 2003 pour que l'Etat daigne penser payer leurs états d'émoluments", lance furax Léopold Tepakbong Songong, huissier de justice à Mokolo. "Les huissiers de justice avaient l'impression d'être abandonnés à eux-mêmes parce que toujours dirigés par les mêmes gens. On estimait que sans assemblées générales, il était difficile de poser nos problèmes et donner une nouvelle dynamique, un nouvel élan à notre profession. Cette profession était devenue marginalisée et non respectée", crache Lucie Mana Ngwoa, huissier de justice à Bertoua. A travers les conciliabules qui se tiennent ça et là, les positions des uns et des autres tournent autour de la rupture. Dans la salle des travaux, la température va monter d'un cran avec l'annonce de l'élection du nouveau Comité directeur. Avec comme pomme de discorde, la validité des chèques par procuration ou non des confrères absents. Au terme de deux heures de discussions houleuses ponctuées par moments d'invectives, les uns et les autres vont finalement s'accorder sur le vote par procuration. Mais, à la seule différence que "seules les procurations des huissiers à jour de leurs contributions qui s'élèvent à 50.000 francs par an son acceptées." Edouard Ndock, sous-directeur des professions judiciaires, représentant le vice-Premier ministre, ministre de la Justice Garde des sceaux qui a rejeté en premier l'idée des chèques par procuration, est soupçonné par certains de vouloir non seulement "infantiliser l'assistance", mais surtout d'avoir été "commandé par la tutelle pour soutenir le Comité directeur sortant." Après ce tohu-bohu, les six candidats en lice pour le poste de président peuvent enfin dérouler tour à tour leur projet de société. Au moment du dépouillement, l'on assistera à une course serrée entre Maîtres Alain Ngongang et Marie Claude Bébi. Avec un score étriqué de 100 voix contre 97, le premier remporte sur la deuxième. Alors que Polycarpe Dimene Yomba, président sortant, vient largement en arrière avec 26 voix seulement. Sur 239 votants, les autres candidats se contenteront des quelques voix restantes en dehors des trois bulletins nuls. Compte tenu de la nuit avancée, de la fatigue qui se lisait déjà sur les visages et des nombreux participants qui désertaient progressivement les lieux, Me Pierre-Marie Tchuenkam, modérateur desdits travaux, va proposer et obtenir de ses confrères un vote groupé des autres membres de l'équipe Ngongang. Il revenait donc à chaque électeur d'inscrire les noms des candidats de son choix. Même si au moment du décompte des voix, l'on enregistrera quelques éclats de voix dans la salle, l'urne transparente commise à l'opération finira par dévoiler l'identité des six autres membres du nouveau Comité directeur. Avec comme surprise, la reconduction au poste de trésorière de Rachel Tchame Deuna, seule rescapée de l'équipe sortante. Comité directeur de la Chambre des huissiers du Cameroun -Président : Alain Ngongang (Yaoundé) -Vice-président : Youssouf Ibrahim (Ngaoundéré) -Secrétaire général : Chantal Bikaï Ngando (Monatélé) -Trésorière : Rachel Tchame Deuna (Bagangté) -Commissaire aux comptes : Célestin Pantui (Bafang) -Conseillers : Atangana Avezo'o (Sangmélima) Penda (Nkongsamba) Sainclair Mezing

Alain Ngongang Sime : Moderniser la profession d'huissier

Le nouveau patron de la Chambre nationale ambitionne de redorer le blason de ce corps. Son faciès contraste avec son âge. D'aucuns pourraient même lui donner la trentaine. Et pourtant c'est cet huissier de justice de 43 ans qui nourrit des projets ambitieux en vue de sortir cette profession de sa léthargie actuelle et lui donner ses lettres de noblesse. Rattaché à un tribunal, c'est à l'huissier qu'échoit la charge de servir aux justiciables des citations, des significations et des convocations sortant du parquet. Tout comme il a la charge de dresser des constats, procéder aux expulsions, recouvrements, saisies et déguerpissements. Auxiliaire de justice, il sert ainsi de courroie de transmission entre celle-ci et les justiciables. Une charge ô combien exaltante, mais qui au fil des années a perdu de sa valeur et réduisant ainsi l'huissier de justice à un simple sédentaire qui doit sa survie à quelques émoluments au paiement sporadique. Une situation plus que révoltante qui n'accorde aucun état de grâce au tout nouveau président de la Chambre des huissiers de justice. A peine élu, Alain Ngongang pense déjà aussi bien au toilettage des textes vieux de vingt neuf ans, qu'à la mise en place d'un règlement intérieur homologué ainsi qu'au développement des stratégies visant le paiement régulier des émoluments du corps. Entre autres défis que la nouvelle équipe se donne, figurent en bonne place l'ouverture d'un siège pour la Chambre, la création d'un site web, la mise en place d'un système social fiable et la mise en place d'un programme de recyclage sont entre autres. Mais, s'il y a un dossier qu'il trouvera dès ce lundi sur sa table, c'est sans doute celui liée à la longue attente de charge à laquelle font face en ce moment près de 350 d'huissiers de justice arrivés en fin de stage. Surtout que lui-même en a fait les frais d'une telle galère. Le certificat de fin de stage d'huissier en poche en 1994 à l'étude de Me Martin Zeufack, alors huissier de justice à Yaoundé et aujourd'hui à la retraite, Alain Ngongang a du ronger son frein quatre années durant en attendant que de nouvelles charges soient créées. Mais, il ne sera pas à la fin de ses angoisses puisqu'il lui faudra encore attendre jusqu'en 2003 pour être enfin nommé huissier de justice. A l'écouter, ce père de trois enfants a l'ambition de mener cette exaltante charge en étroite collaboration avec tout le corps. "Il nous appartient tous, face à l'histoire et devant la postérité, de prendre nos responsabilités pour l'engager résolument dans la modernité. Je travaillerai en parfaite synergie avec mes confrères afin qu'ensemble nous réalisions les rêves les plus légitimes de cette profession", peut-il interpeller ses confrères. Sainclair Mezing




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