Cameroun - Opinion: IMPOSSIBLE N’EST PAS CAMEROUNAIS…, A CONDITION QUE …

Par NDONG TOUNG Antoine | Correspondance
YAOUNDE - 05-Nov-2022 - 13h50   14191                      
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Antoine Ndong Toung Archives
"Le Cameroun vit actuellement un certain nombre de situations susceptibles de compromettre le vivre ensemble tant souhaité par tous les camerounais de bonne volonté, d’une part, et d’ébranler les fondements mêmes de la Nation, d’autre part."

IMPOSSIBLE N’EST PAS CAMEROUNAIS…, A CONDITION QUE …

Le Cameroun vit actuellement un certain nombre de situations susceptibles de compromettre le vivre ensemble tant souhaité par tous les camerounais de bonne volonté, d’une part, et d’ébranler les fondements mêmes de la Nation, d’autre part. Ces situations concernent tous les aspects de la vie nationale à savoir : politique, économique, social, culturel, sécuritaire, voire l’intégrité territoriale de notre pays. C’est dire qu’au regard de la gravité des problèmes que nous vivons en ce moment, et qui risquent de s’intensifier, si rien n’est fait à très court terme, chacun de nous devrait puiser dans ses ressources profondes pour contribuer, à sa manière, sinon à la résolution des problèmes en face, du moins à la réflexion visant à comprendre ce qui nous arrive. C’est dans cette logique que j’ai cru devoir partager mes modestes commentaires sur la situation qui prévaut aujourd’hui chez nous. Mais mon propos consiste surtout à suggérer ce que je considère comme les conditions d’une sortie de crise.

A mon humble avis, les camerounais peuvent relever, par eux-mêmes, tous les défis auquel fait face leur pays. Ma conviction en notre capacité à gérer nos affaires est fondée sur les leçons que les Lions Indomptables nous administrent depuis des décennies, notamment en 1990 en Italie, lors de la CAN 2017 au Gabon, et plus récemment lors de la CAN TOTALENERGIES 2021 et des éliminatoires de la coupe du monde 2022 à Blida en Algérie. En effet, lors de ces différentes compétitions, les nous ont démontré que la boutade populaire ‘’impossible n’est pas camerounais’’, peut devenir une réalité à condition  que les hommes qu’il faut soient à la place qu’il faut et au moment où il le faut. C’est dire que si les leçons de nos Lions sont assimilées par tous, et appliquées dans tous les domaines, les camerounais peuvent effectivement se tirer d’affaire eux-mêmes.

Ainsi, avant de décrire les hommes qu’il faut, de localiser la place qu’il faut et de préciser le moment où il le faut, il convient d’abord de rappeler les leçons antérieures des Lions.

 

I - RAPPEL DES LEÇONS ANTERIEURES DES LIONS

En février 2017 à Libreville au Gabon, les Lions Indomptables avaient remporté, contre toute attente, la 31ème édition de la Coupe Africaine des Nations. Par leur comportement au cours de cette compétition, et ce  malgré le climat délétère qui prévalait dans la galaxie camerounaise du football, depuis la préparation de la CAN de cette année, les lions nous avaient administré quatre leçons fondamentales qu’il n’est pas sans intérêt de rappeler ici.

D’abord, à travers leur prestation au Gabon, les lions nous avaient appris que chacun de nous devait bien faire ce qu’il sait faire, là où il doit le faire. Ensuite, les enfants nous avaient enseigné que les comportements déviants que nous observons dans notre environnement ne doivent pas nous empêcher de poser des actes positifs pour notre pays. Par ailleurs, le onze national, en remportant ce trophée nous exhortait à privilégier les intérêts supérieurs du pays, dans toutes nos entreprises. Enfin, les lions nous ont démontré que chaque camerounais peut se constituer en exemple pour les autres, en accomplissant convenablement la mission qui lui est assignée.

Ainsi, malgré la pertinence et surtout la pérennité de ces leçons, lesquelles doivent être gravées dans nos esprits en permanence, les lions ont encore trouvé le moyen de nous instruire, dans un contexte totalement différent où nous n’avons pas atteint la finale, sur notre propre sol. En effet, en se hissant à la troisième place, comme en 1972, les lions, à travers leur victoire contre le Burkina Faso, nous confortent dans ce que nous clamons très souvent, plus par chauvinisme que par conviction à savoir : impossible n’est pas camerounais. Remonter trois buts, dans les circonstances que nous connaissons relevait effectivement de l’impossible et de l’inédit, mais les lions l’ont fait, pour le grand bonheur de tout le peuple qui n’y croyait plus. C’est dire que les lions auraient dû avoir une distinction spéciale si les lois du football étaient formulées autrement. Les prouesses des Lions, dans ces épreuves ont été possibles parce qu’ils étaient habités d’une fois inébranlable et que l’équipe était constituée des joueurs qu’il fallait, évoluant aux postes qu’il fallait et mis sur le train au moment où il le fallait.

 

II – QUI SONT LES HOMMES QU’IL FAUT ?

De tout temps, l’Homme a toujours été au centre de la vie, en tant qu’acteur majeur qui façonne le visage du monde, en bien comme en mal. C’est dire que le passé, le présent et l’avenir du monde sont largement tributaires, non seulement de la  qualité des hommes qui, à un moment ou à un autre, assument des responsabilités spécifiques à travers le monde, mais également des choix que ces dirigeants opèrent dans l’exercice de leurs mandats respectifs. Ces hommes doivent par conséquent mériter leur place parce que possédant les aptitudes requises. C’est le lieu de noter que les hommes qu’il faut peuvent se recruter dans toutes les strates sociales, à condition qu’ils remplissent des conditions minimales, plus ou moins cumulatives, que j’ai cru devoir proposer ci-après.

En premier lieu, les hommes qu’il faut sont des hommes compétents, c’est-à-dire des personnes qui, par acquisition pratique ou par apprentissage, ont acquis des connaissances spécifiques dans divers domaines de la science. Il s’agit des hommes qui, par leur créativité et leur proactivité, peuvent insuffler des changements notables dans la conduite des affaires de la cité.

Ensuite, les hommes qu’il faut, sont également des hommes d’expérience qui ont fait leurs preuves dans les domaines où ils évoluent. C’est le lieu de relever que la maîtrise des connaissances théoriques est nécessaire, mais pas toujours suffisante dans plusieurs situations. D’où la nécessité de la compléter par une pratique concrète étalée sur des périodes conséquentes.

En outre, les hommes qu’il faut sont des hommes intègres et loyaux. L’intégrité dont il est question ici signifie que les hommes qu’il faut doivent être d’une probité absolue, honnêtes et incorruptibles. La loyauté quant à elle renvoie au respect des lois et règlements qui gouvernent la vie publique, ainsi qu’une fidélité et un dévouement envers les institutions qui incarnent les pouvoirs de l’Etat.

Par ailleurs, les hommes qu’il faut sont des patriotes. Bien que le concept de patriotisme soit large, multidimensionnel et extensible en fonction des circonstances, j’ai cru devoir l’appréhender ici dans son acception la plus populaire qui considère que le patriote est celui qui fait passer l’intérêt de la patrie, du pays, de la nation avant les intérêts personnels ou partisans. Le patriote c’est celui qui considère qu’il  n’y a pas de bonheur à être heureux seul et que le bien-être individuel passe par le bien-être collectif. Celui qui est prêt à donner sa vie pour la patrie comme le disait Nelson Mandela.  

En définitive, les hommes qu’il faut sont les hommes qui maîtrisent les savoirs, les savoir-faire et les savoirs-être. Au Cameroun, ces hommes sont connus et se retrouvent dans le secteur public, dans le secteur privé, dans la société civile, dans le monde rural bref, dans tous les secteurs d’activité sociale. Ces hommes sont encore en activité, tandis que d’autres ont déjà pris leur retraite administrative. Ces hommes sont dans toutes les régions du triangle national, alors que certains font partie de la Diaspora.

Il ressort de ce qui précède que les lions qui nous ont évité l’humiliation devant la face du monde remplissaient bien les conditions décrites ci-dessus. Et si nous les suivons dans nos différents domaines de compétence, impossible ne sera vraiment pas camerounais.

Après le portrait-robot des hommes qu’il faut, dépeint ci-dessus, qu’en est-il de la place qu’il faut ?

 

III – OU EST LA PLACE QU’IL FAUT ?

Comme il a été relevé plus haut, les hommes qu’il faut ne peuvent produire les résultats attendus que lorsqu’ils sont positionnés aux places qui correspondent à leurs aptitudes. Dans cette logique, la place qu’il faut peut s’appréhender selon deux prismes dont l’un technique et l’autre stratégique.

Au plan technique, la place qu’il faut c’est celle qui se trouve dans le domaine où l’on dispose des compétences professionnelles avérées. En effet, le monde du travail est composé d’une multitude corps de métiers dont chacun dispose des spécificités propres qui le distinguent des autres, en fonction de la nature des activités, mais également en fonction des sujétions qui leur sont attachées. C’est dire que lorsqu’on a choisi un métier qu’on exerce avec professionnalisme, l’on devrait être utilisé dans les structures qui ont le plus besoin de cette expertise. Mais l’on observe bien souvent que des compétences sont utilisées hors de leur sphère de prédilection, ou en deçà de leurs aptitudes professionnelles. Cette manière de gérer les ressources humaines est parfois la cause des contre-performances que l’on enregistre dans les organisations et notamment dans les entités publiques.

A ce même niveau technique, la place qu’il faut peut également être perçue en termes de poste de travail occupé. Là encore, l’on peut relever qu’il ne suffit pas seulement de travailler dans une structure correspondant à son profil. Encore faut-il avoir un positionnement conséquent vous permettant de donner le meilleur de vous-mêmes, dans l’intérêt bien compris du service. Pour revenir au cas des lions, l’on peut s’accorder à reconnaître que si Vincent ABOUBAKAR avait plutôt été intégré dans l’équipe au poste de gardien de but, le résultat n’aurait pas été celui que nous connaissons. C’est dire toute l’importance qu’il y a à utiliser les ressources humaines là où elles peuvent avoir le meilleur rendement.

Au plan stratégique, la place qu’il faut est l’endroit à partir duquel l’on peut impulser un changement général. Les organisations modernes, à travers le monde, sont structurées en multiples postes de travail et de responsabilités qui n’ont pas toujours le même impact sur la vie de ces entités. Les responsables et les structures qui exercent les activités de conception, de contrôle et d’orientation ont certainement un rôle plus déterminant que ceux qui sont chargés de l’exécution, fut-elle spécialisée. L’on se retrouve ici dans la logique du train où une locomotive puissante peut parvenir à tirer plusieurs wagons lourdement chargés. C’est dire qu’en plaçant les hommes qu’il faut au niveau de la locomotive, il y a de fortes chances d’obtenir une avancée significative de l’attelage.

Dans les organisations, ce rôle d’impulsion est dévolu  au top management qui en constitue la plaque tournante et la locomotive. Il s’ensuit que c’est à ce niveau que l’on doit retrouver les hommes qu’il faut. Ne dit-on pas souvent que les structures ne valent que par la qualité des hommes chargés de les animer ? Ainsi, les places devant accueillir les hommes qu’il faut étant déjà identifiées, il s’agira maintenant de savoir à quel moment les mettre en mouvement.

 

IV – QUEL EST LE MOMENT QU’IL FAUT

Ce que les lions ont réalisé a eu l’écho que l’on connaît parce que cela s’est produit à un moment particulier de l’histoire du football camerounais. Moment fait de doutes, de découragement, de démission et d’humiliation. Il convient de rappeler que le moment dont il est question ici se réfère davantage  au contexte qui a prévalu autour de l’organisation de cette CANTOTALEnergies 2021. En effet, entre les retards observés dans la réalisation des infrastructures de la CAN, la remise en cause, par une certaine opinion nationale et internationale de la capacité du Cameroun à organiser cet évènement, beaucoup de compatriotes ne croyaient plus à la tenue effective de cette compétition au Cameroun. Même après l’ouverture solennelle de la CAN, des histoires de toutes natures ont été inventées pour discréditer l’évènement, tandis que des accusations de fraude et de tricherie fusaient de toute part pour dénigrer notre pays. Il fallait avoir un moral de fer, que dis-je, un moral de lion pour tenir dans cette atmosphère nauséabonde, et les lions ont tenu, parce que le moment le commandait.

Le Cameroun était en péril, il fallait le sauver. Le Cameroun était dans le doute, il fallait le rassurer. Le Cameroun était au bord de l’humiliation, il fallait le réhabiliter. Les lions l’ont fait. C’est dans ce genre de circonstances que les hommes qu’il faut doivent descendre dans l’arène pour sauver la Patrie. Ne dit-on pas souvent qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ? C’est le lieu de relever que dans certains domaines d’activité nationale, le Cameroun est en péril, dans le doute, au bord de l’humiliation, au point qu’il devient impératif que des hommes qu’il faut sortent enfin du chapeau.

Ce que les lions ont réalisé n’a été possible que parce qu’ils étaient animés d’une foi inébranlable, d’une détermination sans faille, d’une volonté de vaincre et d’une solidarité à toute épreuve. L’on a ainsi vu comment ils ont étouffé les polémiques nées de l’élimination par l’Egypte, pour se ressaisir et faire échec, in extremis, à un adversaire qui se prenait déjà pour vainqueur. Il faut reconnaître que Vincent ABOUBAKAR, TOKO EKAMBI et MOUMI NGAMALEU, trois footballeurs talentueux  sont entrés dans le match à leurs postes de prédilection respectifs, au moment où l’équipe et tout le Cameroun avaient besoin d’eux pour renverser la tendance, et ils l’ont fait. Voilà les hommes qu’il fallait, à la place qu’il fallait, et au moment où il le fallait.

En conclusion, si tous les camerounais, dans leurs domaines respectifs d’activités, pouvaient tempérer leurs élans égoïstes, et se comporter comme les lions, nous relèverons tous les défis auxquels notre chère patrie est confrontée, et nous pourrons alors clamer fièrement : IMPOSSIBLE N’EST PAS CAMEROUNAIS. En sommes-nous capables ? Question à milles sous./-

 

Yaoundé, le 26 août 2022

NDONG TOUNG Antoine

Administrateur Civil Principal Hors Echelle





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