Le 27 juillet 2022, le préfet du département de la Kadéy, dans la région de l’Est du Cameroun, a signé « un arrêté portant fermeture de toutes les sociétés minières en activité à Kambele-Batouri ». A l’article premier de ce texte, Djadaï Yacouba que «ces sociétés minières exerçant à Kambele, une banlieue de la ville de Batouri (le chef-lieu du département de la Kadéy, ndlr), sont fermées jusqu’à nouvel ordre».
Pour justifier sa décision, motivée entre autres par « des instructions du gouverneur de la région de l’Est », l’autorité administrative évoque «des morts récurrentes de personnes par noyade du fait de la non fermeture des trous miniers après exploitation ; des morts récurrentes par éboulement du fait du non-respect des normes d’exploitation minière ; la menace de la dégradation de la route nationale n°10, au PK 44+820 du fait de l’obstruction du lit du cours d’eau par des coulées boueuses ».
Jusqu’à ce que nous allions sous presse, et malgré nos multiples tentatives pour y parvenir, CIN n’avait pas encore pu obtenir l’identité des entreprises minières incriminées. Seulement, si l’on s’en tient aux indications souvent données par l’organisation à but non lucratif Forêts et développement rural (Foder) qui mène depuis 2015 un projet de gouvernance minière dans les régions de l’Adamaoua et de l’Est du pays, « une dizaine de sociétés sont impliquées dans les centaines de morts répertoriés. Il s’agit de Dynastie Mining, Lu, Mme Lu, Wang, Phoenix Mining, « Chinois », Southland Mining, HMC Mining, Hong-Kong Mining, C&K Mining et Scem.»
Selon un fichier tenu par cette entité, «de 2014 au 30 avril 2021, l’on a enregistré 157 morts dans les chantiers miniers de l’Est». Avec 29 décès enregistrés au cours de cette période, le département de la Kadéy est le deuxième plus meurtrier, derrière le Lom-et-Djerem qui en compte 120. Si on y ajoute les huit morts de Bélita 2 et les deux de Kambele en juin 2022, les chiffres macabres de la Kadéy montent officiellement à 39 morts. Selon le macabre palmarès dressé par Foder, « ces décès sont dus aux noyades (56%), éboulements de terrain (26%) et braquages à main armée (11%).»
Respect des textes
Suffisant donc pour que l’arrêté préfectoral du 27 juillet 2022 rencontre l’assentiment de tous ceux qui luttent contre les violations des normes environnementales dans les sites miniers de l’Est. Tous espèrent qu’avec ce texte qui marque une rupture dans les habitudes des autorités administratives dans les zones minières, l’on s’achemine vers le respect des textes en vigueur. Notamment la loi n°96/12 du 5 août 1996 portant loi cadre relative à la gestion de l’environnement. En son article 37, alinéa 1, ce texte stipule que « les titulaires de titres miniers ou de titres de carrières sont tenus à l’obligation de remettre en l’état les sites exploités ». Cette loi est appuyée par le nouveau code minier du Cameroun, voté en décembre 2016. Qui dispose en son article 136 que « les anciens sites miniers et de carrières doivent retrouver des conditions stables de sécurité, de productivité agro‐sylvo‐pastorale et d’aspects visuels proches de leur état d’origine ou propices à tout nouvel aménagement de façon durable ».
Bernard Bangda, CIN