Le prince limoge les ministres importants originaires de son aire géographique. Pour rassurer le Grand Nord ?
On se serait attendu à un remaniement ministériel ; un mouvement d’ampleur, pour tirer les leçons des dernières élections législatives. Mais, le prince vient de prendre tout le monde de court, en procédant vendredi dernier à un réaménagement gouvernemental. Si le remaniement peut permettre de donner une nouvelle orientation ou un nouvel élan à l’activité gouvernementale, le réaménagement permet de résoudre un problème ponctuel. On pourrait donc penser que Paul Biya a voulu résoudre, vendredi dernier, un problème pressant. Un problème manifestement politique, vu la stature et l’importance des ministres limogés. Outre Augustin Kodock, balayé par les législatives du 22 juillet 2007 dans le Nyong-et-Kellé, Dakolé Daïssala et Ebénézer Njoh-Mouelle emportés par l’absence de réaction et de communication du gouvernement aux premières heures du crash d’un avion de la Kenya Airways à Douala en mai dernier, la plupart des ministres en vue, limogés, ont la particularité d’avoir souvent été cités comme membres du G 11.
Le G11 ou Génération 2011 désigne une nébuleuse yaoundéenne, qui serait constituée de quadragénaires et de quinquagénaires du Rdpc, ministres, directeurs-généraux et hauts cadres de l’Administration publique, à qui l’on prête l’ambition de s’organiser pour prétendre à la succession de Paul Biya à qui la Constitution interdit de se représenter au terme de son second mandat en 2011. Si le prince à qui d’aucuns prêtent l’intention de modifier la Constitution et de se représenter, voulait se débarrasser de ceux qui autour de lui, parient déjà sur sa retraite, on peut penser qu’il a voulu y parvenir en limogeant les ministres Jean-Marie Atangana Mebara, Polycarpe Abah Abah, Urbain Olanguena et Louis-Marie Abogo Nkono, souvent présentés comme membres du G11. Mais, le mouvement du vendredi 7 septembre va bien au-delà du G11. A y regarder de très près, ce réaménagement gouvernemental touche surtout et profondément l’ancienne province du Centre-Sud, l’aire géographique d’origine du prince.
Le Centre-Sud décapité
On peut le constater, la plupart des ministres remerciés vendredi sont originaires de la même aire géographique que le président. Un peu comme si le prince avait voulu faire le ménage dans son fief. Plus encore : après l’embastillement de Titus Edzoa et de Pierre-Désiré Engo, la mise au placard de Edouard Akame Mfoumou et Joseph Owona, le Centre-Sud vient de perdre avec Atangana Mebara, Abah Abah et Olanguena Awono, ses derniers représentants d’envergure, susceptibles de prétendre à la succession du prince. Certes, le Centre-Sud reste la région la plus pourvue en ministres, mais elle n’a plus de leader, plus de candidat potentiel. De cette région, le ministre le plus ancien au grade le plus élevé s’appelle désormais Jacques Fame Ndongo. Fidèle du prince, c’est certain. Présidentiable ? Il faut voir.
Davantage, sur le plan protocolaire, le Centre-Sud perd son envergure. Il n’a plus de ministre d’Etat. Il en comptait pourtant deux jusqu’au réaménagement de vendredi dernier. Les deux ministres d’Etat Léopold-Ferdinand Oyono et Atangana Mebara qui quittent le gouvernement n’ont pas été remplacés sur le plan protocolaire. Cela est d’autant plus marquant que le réaménagement de vendredi dernier crée un vice-premier ministre originaire de l’Ouest et épargne superbement le Grand nord qui conserve donc son poste de vice-premier ministre et ses deux ministères d’Etat.
La logique de Paul Biya
C’est clair, Paul Biya muselle les siens, coupables d’empressement gênant pour 2011. Il étouffe les velléités présidentielles venant de son aire géographique. Ce faisant, le prince envoie un signal aux élites du Grand nord qui se veulent héritiers de l’axe Nord – Sud et qui ont pu s’inquiéter et manifester des signes de mécontentement contre l’empressement des sudistes. Le prince espère peut-être ainsi rassurer le Grand nord : il ne prépare pas sa succession avec les siens. Le problème politique auquel le président voulait trouver une solution, semble donc être le Grand nord dont les élites manifestent de plus en plus un certain agacement qui s’est clairement exprimé en acte de rupture récemment, lors de l’élection du président de l’Assemblée nationale.
Au-delà de ce problème politique ponctuel, le réaménagement de vendredi dernier, ne permet pas de lire davantage les intentions véritables de Paul Biya. Bien malin qui dira où l’on va et quand on y va. Même les exégètes du discours présidentiel ne s’y retrouvent pas. Le président a récemment fait deux prestations médiatiques contradictoires en l’espace d’un mois. Au sortir de son bureau de vote le 22 juillet, il avait laissé l’impression qu’il entendait se retirer au terme de son mandat. Mais, quelques jours après, dans son dernier message à la nation, il s’est donné un nouveau dessein à la tête du Cameroun, qui pourrait aller au-delà de 2011 ; se présentant notamment en rassembleur de toutes les forces politiques qu’il se disait prêt à associer à l’action de l’Etat. Justement, son premier acte politique posé après cet engagement, n’annonce pas le rassemblement et l’ouverture promis. Que se passe-t-il à Yaoundé ?
Réorganisation du gouvernement
Décret N° 2007/268 du 07 septembre 2007 modifiant et complétant certaines dispositions du décret N° 2004/230 du 08 décembre 2004 portant organisation du Gouvernement.
ARTICLE 1er.- (1) Les dispositions de l’article 4 (1) du décret n° 2004/230 du 08 décembre 2004 portant organisation du Gouvernement sont modifiées et complétées ainsi qu’il suit en ce qui concerne le Ministère de l’Economie et des Finances et le Ministère de la Planification, de la Programmation du Développement et de l’Aménagement du Territoire :
1 - Au lieu de: Ministère de l’Economie et des Finances ;
Lire : Ministère des Finances
2 - Au lieu de : Ministère de la Planification, de la Programmation du Développement et de l’Aménagement du Territoire ;
Lire :Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire.
(2) Les dispositions de l’alinéa (2) de l’article 4 du décret susvisé sont modifiées et complétées ainsi qu’il suit :
“ Des Ministres Délégués assistent le Ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, le Ministre de l’Agriculture et du Développement Rural, le Ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire, le Ministre de l’Environnement et de la Protection de la Nature, le Ministre des Finances, le Ministre de la Justice et le Ministre des Relations Extérieures ”.
(3) Les dispositions de l’alinéa (3) de l’article 4 du décret susvisé sont modifiées et complétées ainsi qu’il suit :
“ Des Secrétaires d’Etat assistent les Ministres dans les départements ministériels ci-après :
1. Ministère du Commerce ;
2. Ministère de la Défense ;
3. Ministère de l’Education de Base ;
4. Ministère des Enseignements Secondaires ;
5. Ministère des Forêts et de la Faune ;
6. Ministère de l’Industrie, des Mines et du Développement Technologique ;
7. Ministère de la Justice ;
8. Ministère de la Santé Publique ;
9. Ministère des Transports ;
10. Ministère des Travaux Publics. ”
(4) Le Ministère des Finances et le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire prennent rang suivant l’ordre alphabétique de ministères prévus par le décret susvisé.
(5) Les dispositions de l’article 5 (12) et (26) du décret n° 2004/320 du 08 décembre 2004 susvisé sont modifiées en conséquence et complétées ainsi qu’il suit :
“ ARTICLE 5 (12) (nouveau) : Le Ministère des Finances est chargé de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière financière, budgétaire, fiscale et monétaire.
En matière budgétaire et fiscale, il est responsable :
1. de l’élaboration de la loi de finances ;
2. de la préparation, du suivi et du contrôle de l’exécution du budget de fonctionnement de l’Etat, ainsi que de l’exécution du budget d’investissement, en relation avec le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire ;
3. des impôts et des douanes ;
4. du contrôle financier des organismes dotés d’un budget annexe et des établissements publics autonomes suivant les règlements propres à chaque organisme ;
5. de la mise en œuvre des privatisations et de la réhabilitation des entreprises publiques ;
6. du suivi et du contrôle de la gestion des créances et des participations publiques, de l’endettement des personnes morales de droit public et de l’emploi des subventions ;
7. de la prévision à court terme dans le cadre de l’élaboration du budget.
En matière monétaire et financière, il assure :
1. la gestion de la dette publique intérieure et extérieure ;
2. la gestion du trésor public ;
3. la promotion de l’épargne et de son emploi pour le développement économique ;
4. le suivi de la coopération monétaire ;
5. le suivi des dossiers de l’OHADA en liaison avec le ministère chargé de la justice et les autres administrations compétentes ;
6. le contrôle des finances extérieures, de la monnaie et de la réglementation des changes ;
7. l’élaboration de la balance des paiements ;
8. le suivi et le contrôle des établissements de crédit, des compagnies d’assurances et des marchés financiers ;
9. le suivi des affaires du Fonds Monétaire International.
Il assure la tutelle de l’Institut d’Emission, des établissements de crédit et des compagnies d’assurances, de la Caisse Autonome d’Amortissement et de la Société de Recouvrement de Créances du Cameroun.
Lui sont rattachés le Centre National de Développement Informatique, la Commission Technique de privatisation et des Liquidations des Entreprises Publiques, et la Commission Technique de Réhabilitation des Entreprises Publiques.
ARTICLE 5 ( 26) ( nouveau) : Le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire est chargé de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique économique de la nation ainsi que de l’aménagement du territoire.
A ce titre, il est responsable : En matière économique :
1. De la cohérence et de la coordination des actions engagées, avec les divers partenaires internationaux et bilatéraux, dans le cadre du programme de Redressement et de la Relance Economiques ;
2. Du suivi des affaires de la Banque Mondiale, de l’Union Européenne, de la Banque Africaine de Développement et de la Banque Islamique de Développement ;
3. Du suivi de la coopération sous-régionale et internationale, notamment avec le programme des Nations Unies pour le Développement, la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique, le CEMAC et la CEEAC ;
4. De la prospection, la négociation, la finalisation et le suivi de l’exécution des accords et conventions de prêts ;
5. De l’élaboration du programme d’investissement pluriannuel de l’Etat ;
6. De la centralisation des projets et de la gestion de la banque des projets ;
7. De la promotion des investissements publics ;
8.De la préparation des Cadres de Dépenses à Moyen Terme et du Budget d’Investissement Public ;
9. Du suivi et du contrôle des programmes et projets d’investissement, en liaison avec les ministères sectoriels et le ministère chargé des finances ;
10. De la coordination des études et du suivi des questions de population ;
11.Du suivi de l’analyse conjoncturelle à court, moyen et long termes ;
12. Des orientations fondamentales et des stratégies de réhabilitation et de privatisation des entreprises publiques
En matière de planification
1. De la réalisation des études et des analyses prospectives sur le développement du pays à moyen et long termes ;
2. De l’élaboration d’un cadre global de planification stratégique du développement du pays ;
3. De la cohérence des stratégies sectorielles de développement du pays ; de la coordination et du suivi de la mise en œuvre de la stratégie de réduction de la pauvreté ;
4. De la coordination de la centralisation des études sur les projets d’intérêt économique national et du suivi de leur réalisation ;
5. Du suivi de la coordination de la politique de développement économique et social du gouvernement ;
6. De la planification des ressources humaines.
En matière d’aménagement du territoire,
1. De la coordination et de la réalisation des études d’aménagement du territoire, tant au niveau national que régional ;
2. De l’élaboration des normes et règles d’aménagement du territoire et du contrôle de leur application ;
3. Du suivi et du contrôle de la mise en œuvre des programmes nationaux, régionaux ou locaux d’aménagement du territoire ;
4. Du suivi des organisations sous-régionales s’occupant de l’aménagement ou de la préservation de l’écosystème sous-régional.
Il assure la tutelle des Missions de développement ou d’aménagement du territoire, de l’Institut National de la Statique, de l’Institut Panafricain pour le Développement, de l’Institut Sous-régional de la Statistique Démographique, du Bureau Central des Recensement et des Etudes de la Population.
Lui est rattaché, le Comité Technique de Préparation et de Suivi du Programme d’Ajustement Structurel.
Le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire co-préside le Comité Interministériel chargé des privatisations et de la réhabilitation des entreprises publiques ”.
“ LE RESTE SANS CHANGEMENT ”.
ARTICLE 2.- Sont abrogées toutes dispositions antérieures contraires.
ARTICLE 3.- Le présent décret sera enregistré, publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au Journal Officiel en français et en anglais./-
Yaoundé, le 07 Septembre 2007
Le Président de la République,
PAUL BIYA
Reamenagement
Décret N° 2007/269 du 07 septembre 2007 portant réaménagement du Gouvernement.-
LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
SUR proposition du Premier Ministre, Chef du Gouvernement ;
DECRETE:
ARTICLE 1er: Sont, à compter de la la date de signature du présent décret nommés aux postes ministèriels ci-après
VICE-PREMIER MINISTRE, MINISTRE DE L’AGRICULTURE ET DU DEVELOPPEMENT RURAL
M. Nkuete Jean
MINISTRE DES FINANCES
M. Essimi Menye Lazare
MINISTRE DE L’ECONOMIE DE LA PLANIFICATION ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE
M. Motaze Louis Paul
MINISTRE DES RELATIONS EXTERIEURES
M. Eyebe Ayissi Henri
MINISTRE DE LA CULTURE
Mme. Ama Tutu Muna
MINISTRE DE l’ INDUSTRIE , DES MINES ET DU DEVELOPPEMENT TECHNILOGIQUE
M. Ndanga Ndinga Badel
MINISTRE DES TRANSPORTS
M. Gounokou Haounaye
MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE
M. Mama Fouda André
MINISTRE DE LA COMMUNICATION
M. Biyiti Bi Essam Jean Pierre
MINISTRE DES DOMAINES ET DES AFFAIRES FONCIERES
M. Anong A Dibeme Pascal
MINISTRE DELEGUE AUPRES DU MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE LA PLANIFICATION ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE
M. Yaouba Abdoulaye
MINISTRE DELEGUE APRES DU MINISTRE DES FINANCES
M. Titti Pierre
MINISTRE CHARGE DE MISSION A LA PRESIDENCE
M. Atanga Nji Paul
SECRETAIRE D’ETAT AUPRES DU MINITRE DE L’INDUSTRIE DES MINES ET DU DEVELOPPEMENT TECHNOLOGIQUE
M. Fuh Calistus Gentry
SECRETAIRE D’ETAT AUPRES DU MINITRE DES TRAVAUX PUBLICS
M. Nyetam Nyetam Hans
SECRETAIRE D’ETAT AUPRES DU MINISTRE DES FORETS ET DE LA FAUNES
M. Mata Joseph Roland
SECRETAIRE D’ETAT AUPRES DU MINISTRE DES TRANSPORTS
M. Mefiro Oumarou
SECRETAIRE D’ETAT AUPRES DU MINISTRE DE L’EDUCATION DE BASE
M. Manga Ewolo André
LE RESTE SANS CHANGEMENT
ARTICLE 2.- Le présent décret sera enregistré, publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au Journal Officiel en français et en anglais./-
Yaoundé, le 07 Septembre 2007
Le Président de la République,
PAUL BIYA