L’Association pour la Défense des Droits de l’Homme trouve les méthodes du ministère de la Justice anti-démocratiques.
Il y a plus d’une décennie, le feu professeur Stanislas Melonè décriait déjà la désuétude des lois pénales camerounaises quand il disait : " le code pénal camerounais doit être mis au feu et brûlé ". Treize ans ont passé, depuis la dernière grande réforme du système judiciaire Camerounais et aujourd’hui, le débat semble ouvert sur la scène publique – la réforme des lois pénales s’impose – toute la communauté juridique locale y est unanime : cela va des vides juridiques, des textes incomplets, muets, inadaptés au contexte judiciaire actuel en passant par les lenteurs et lourdeurs de la machine judiciaire. Une institution de sondage, Transparency International a cité la corruption parmi l’un des fléaux qui minent la crédibilité des institutions judiciaires camerounaises et qui crée la réticence des partenaires techniques et financières à investir dans notre pays.
Les pouvoirs publics sont décidés à circonscrire le fléau qui est de nos jours, un renversement de l’échelle des valeurs. Or le processus actuel d’une réforme de la loi pénale qui ne souffre d’aucun doute a été abordé par le ministère de la Justice d’une manière très peu orthodoxe : Le texte du projet de loi n’a été rendu public donc n’a pas été accessible au public.
Une réforme a pour objet de moderniser la législation afin de lui donner la souplesse nécessaire tout en fournissant des garanties aux divers intervenants.
Or la réforme que veut entreprendre le gouvernement camerounais sur les institutions judiciaires reste secrète. Les Camerounais ne sont pas * de la réforme et quand bien même ils le seraient, ne savent pas sur quoi portera la réforme, quels articles de la loi pénale faudrait-il apporter des amendements.
Qu’est ce qui justifie le processus de la réforme, dans quel domaine a-t-on constaté les lacunes, les vides juridiques et quelles sont les propositions qui y sont faites ?
La réforme actuelle sur la loi pénale reste vague dans l'esprit de tout individu. Seul le ministre de la Justice et le bâtonnier qui a constitué des commissions à la demande de ce dernier au centre, au Littoral et au Sud-Ouest peuvent valablement répondre aux inquiétudes des citoyens à travers le rapport de leurs travaux qui doit être déposé dans les prochains jours.
Cependant, il est de notoriété publique qu'une réforme dans un état démocratique puisse interpeller toutes les composantes œuvrant dans le domaine concerné. Or, le gouvernement a pris l’habitude de faire les projets de lois dans les tiroirs et de les opposer aux citoyens lorsque ceux-ci sont déjà au niveau de l’Assemblée nationale pour adoption et promulgation.
Si le chef de l’Etat, monsieur Paul Biya a libéralisé la vie socio-politique en prônant la transparence, et autorisé la création des Ong et Associations c’est tout simplement pour que chaque citoyen puisse prendre part à la vie politique, sociale, économique et culturelle de sa cité.
Or la manière de procéder au ministère de la Justice ne va pas dans le sens de permettre aux citoyens d’intervenir dans les débats, ce qui revient à dire que seul l’avis du bâtonnier de l’ordre des avocats et de son entourage dans le secret des dieux suffira pour refléter l’opinion publique, laissant la société civile pour compte ; Toute réforme commence en principe par la publication du texte du projet de loi ; Le cas le plus récent est celui de la France sur la réforme des retraites adoptée en juillet 2003 ; au cours de cette réforme qui a eu une large audience publique, la société civile a été invitée à prendre part, ainsi que l’ensemble des partenaires concernés ; Ensuite l’information du public
Celle-ci se fait à travers des réunions, des tables rondes, des séminaires, des colloques organisés par le gouvernement mais aussi par des associations ; Des sites doivent également être mis en place dans le but d’informer les citoyens mais également de leur donner la possibilité d’intervenir dans les débats à travers les forums de discussion, des groupes de réflexion créés par le gouvernement afin de l’aider à synthétiser les propositions des acteurs de la société civile;
L’implication des Ong et Associations de la société civile qui réclament le droit légitime de donner leur point de vue sur le fonctionnement des institutions, marque la volonté partagée d’assurer plus de protection aux droits individuels en permettant d’établir un contact étroit avec les citoyens ; Enfin faciliter aux citoyens et aux partenaires le suivi de la mise en œuvre de la réforme. Ceci suppose que les intervenants soient régulièrement tenus informés sur les étapes majeures franchies ainsi que les difficultés qui ne manqueront pas de jalonner le processus par une information continuelle des citoyens ; La pérennisation du processus consultatif devrait permettre de procéder aux corrections nécessaires et de s’assurer que les enjeux de la réforme sont bien compris et partagés ; Car en résumé, la respectabilité d’un système de justice pénale dépend de son acception par les citoyens, d’où la nécessité d’y avoir accès, de la connaître et d’en savoir la logique.