L'entraîneur national a cédé aux pressions. Pierre Lechantre remis en selle...
Mercredi soir, la nouvelle a parcouru la capitale comme une traînée de poudre. Jean Paul Akono a démissionné de ses fonctions de sélectionneur de l'équipe nationale de football, les Lions indomptables. En même temps que sa lettre de démission parvenait au ministre de la Jeunesse et des Sports, ce dernier chargeait "temporairement" Pierre Lechantre de la coordination de l'équipe nationale. Les autres membres de l'encadrement technique, pour leur part, restent en place : Jean Manga Onguéné, Thomas Nkono et Youdom. Le match perdu face aux Palancas negras (panthères noires) d'Angola a donc été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase.
Dès le coup de sifflet final de la rencontre retransmise par la radio nationale, quelques supporters surexcités et en colère ont menacé de saccager le domicile de l'entraîneur Akono, au quartier Anguissa à Yaoundé. Il a fallu l'intervention des forces de l'ordre pour que l'on en arrive pas à cette extrémité. Et encore, jusqu'à ce jour, des éléments de la police continuaient de monter la garde autour de la maison. Toujours au lendemain de la défaite de dimanche, la presse se faisait l'écho de l'inquiétude qui montait par rapport à l'avenir des Lions. Après cinq matches et autant de victoires dans les éliminatoires pour la Coupe du monde Japon Corée 2002, on aurait pu penser que le plus difficile était passé. Il reste en effet deux matches pour la qualification, l'un face au Togo à Yaoundé et l'autre contre la Zambie à Lusaka. Rien n'indique que les Lions l'auraient emporté ou l'emporteront. Surtout avec la pente décroissante de leur rendement. La menace était claire et il fallait faire quelque chose. Même le quotidien pro-gouvernemental Cameroon Tribune, d'habitude modéré, a joint sa plume à celle d'autres parutions pour demander que des mesures soient prises. Et dans les esprits, il n'y avait qu'une mesure à prendre: écarter d'une façon ou d'une autre Akono. Et personne n'est dupe. Les observateurs ici pensent que Akono a été contraint à la démission par le ministre de la Jeunesse et des Sports Bidoung Mkpatt, celui-là même qui l'avait nommé à la surprise générale, il y a sept mois. En remplacement du français Pierre Lechantre. La situation du ministre devenait chaque jour plus délicate. Soupçonné de protéger l'entraîneur démissionnaire, il a sans doute commencé à redouter de payer les frais d'un quelconque dérapage dans une question qui cristallise les fantasmes de toute la nation.
Les raisons invoquées par Jean Paul Akono pour justifier les mauvais résultats des Lions n'ont donc pas tenu la route. L'ex-entraîneur n'avait par ailleurs pas cessé d'accuser ses détracteurs, dans la presse notamment, d'être à la solde de Pierre Lechantre, ravalé au titre de directeur technique. Les frustrations sont nées de ce que le Français, en révolutionnant le système de jeu des Lions, avaient donné une âme à l'équipe. La sélection a abandonné le rigide 4-4-2 pour souvent évoluer avec 3 défenseurs, 2ailiers défensifs et 5 milieux de terrain dont deux offensifs. La mayonnaise avait pris et les Lions étaient devenus imbattables. Les résultats que l'on sait ont fini par convaincre le public que la défaite -comme l'impossible n'est-ce pas ?- n'était plus camerounaise. Jean Paul Akono avait effectivement repris la recette mais quelque chose, peut-être les mots, ont manqué. Il faut tout de même dire qu'au sein même de l'équipe, le climat n'était plus à la sérénité. Sous cape, les joueurs n'en finissaient pas de contester le choix porté sur Akono. Publiquement, aucun d'eux n'a jamais dit être en désaccord avec le coach. Pour des raisons que l'on devine. On les entendait répéter inlassablement "il n'y a pas de problème avec l'entraîneur". Personne n'y croyait bien sûr. D'ailleurs, au soir de la courte victoire sur le onze libyen, les joueurs rencontraient le ministre Bidoung pour lui rappeler qu'ils n'avaient pas été consultés pour la nomination de Jean Paul Akono. Et les défections de Mboma, Foé, Song Bahanag, Eto'o Fils et de Wome Nlend, l'autre jour en Angola, étaient plus que suspectes. En effet, la plupart de ces footballeurs ne sont pas titulaires dans leurs clubs en Europe et tous avaient fait le serment de disputer toutes les rencontres qualificatives pour la Coupe du monde. Pourquoi n'ont-ils pas fait le déplacement de Luanda ? On répond que c'était là, l'acte ultime de défiance à l'égard d'un coach dont ils ne voulaient plus.
Pierre Lechantre revient aux affaires avec la tâche de mener les Lions au prochain tournoi des confédérations où les Lions rencontreront le Brésil et le Japon entre autres. Sans oublier que le Cameroun n'est toujours pas qualifié pour le mondial de 2002.