Jean-Bosco Talla, le directeur de publication du journal «Germinal» et promoteur de «La Grande Palabre», est un homme heureux. La justice vient de lui donner gain de cause dans deux affaires l’opposant aux sous-préfets de Yaoundé 1er et Yaoundé 2è.
La première affaire remonte au 6 novembre 2014. Le journal Germinal, initiateur des débats mensuels dénommés ‘La Grande Palabre’, décide d’inviter le Dr Christopher Fomunyoh, directeur Afrique du NDI. Il devait entretenir l’auditoire sur le thème: «Institutions démocratiques, libertés, gouvernance économique et sociale : quelles perspectives pour le Cameroun et l’Afrique d’aujourd’hui et de demain ?».
Malgré la déclaration de réunion publique déposée auprès de la sous-préfecture de Yaoundé I par les organisateurs de l’événement, la réunion est interdite par l’autorité administrative. Motif évoqué : «l’objet de la conférence-débat en date du 6 novembre 2014 est contraire aux dispositions de la loi sur la communication sociale et au récépissé de déclaration de votre organe de presse».
Toutes les démarches entreprises pour lui faire entendre raison resteront vaines, explique Jean Bosco Talla, le directeur de publication du journal Germinal. Le 8 mai 2015, il décide d’introduire auprès du tribunal administratif, un recours contentieux indemnitaire pour «excès de pouvoir et détournement de pouvoir».
Près de deux ans après l’interdiction de la première conférence, le 28 janvier 2016, Jean Bosco Talla décide d’organiser une conférence-dédicace de l’ouvrage «Société civile et engagement politique au Cameroun», dans un hôtel situé dans l’arrondissement de Yaoundé 2.
Un changement d’arrondissement infructueux car, le sous-préfet de cet arrondissement va également interdire la conférence-dédicace aux motifs que «La Grande Palabre n’a pas d’existence légale; le journal «Germinal» n’a pas vocation à organiser des conférences-dédicaces; le risque potentiel de trouble à l’ordre public reste constant». Le directeur de publication décide d’attaquer également cette mesure du sous-préfet de Yaoundé 2e en justice.
Après de multiples renvois et près de cinq ans d’attente, le tribunal s’est prononcé le 18 février 2020. En ce qui concerne la première affaire, le tribunal administratif a décidé d’annuler la décision du sous-préfet de Yaoundé 1 et condamne l’État du Cameroun à verser à Germinal la somme de 2 000 000 FCFA.
Le tribunal a également annulé la décision d’interdiction du sous-préfet de Yaoundé 2 et a condamné l’État à payer à Germinal la somme de 1 000 000 FCFA.
Pour le directeur de publication du journal Germinal, c’est une victoire en ce qui concerne l’organisation des réunions publiques au Cameroun. «L’essentiel pour nous, ce sont les conséquences et les implications de ces décisions qui sont immenses pour toute la société. Elles paralysent les dérives maladives des autorités administratives dans leurs manies d’interdire systématiquement les réunions publiques. Elles libèrent ainsi le champ des réunions publiques et les sous-préfets ne pourront plus dire que les médias et autres entreprises de presse n’ont pas vocation à organiser les réunions publiques ou les conférences-débats».
À partir de maintenant, poursuit-il, «il existe au Cameroun, une jurisprudence Germinal, en matière de réunions publiques. Et il est aussi désormais interdit aux autorités administratives d’interdire les réunions publiques».