Le 6 janvier 2020, l’émission Echos de Paris diffusée sur la télévision internationale Vox Africa recevait l’activiste panafricaniste suisso-camerounaise Nathalie Yamb. La conseillère exécutive du président du parti d’opposition LIDER a répondu à des questions en rapport avec le Cameroun. Elle est revenue sur son parcours et celui de ses parents.
« Je viens d’une famille qui s’est battue beaucoup. Mes parents ne sont pas de la haute. Pas du tout. Ma mère est couturière, mon père est menuisier. J’ai vu mes parents se battre. Mon père a connu ma mère dans les années 60 en Suisse quand il était allé faire son apprentissage. Il lui a dit tout de suite : « moi là je ne suis pas venu dans votre pays pour rester jusqu’à perpétuité. Si tu m’épouses, un jour on va aller dans mon pays. Ils nous ont ramassés mon frère et moi, ils nous ont amenés au Cameroun en 1977. Et aujourd’hui ma mère vit toujours là-bas avec mon père. Ma mère est plus Camerounaise que beaucoup de Camerounais. Elle conduit d’ailleurs comme une Camerounaise. Quand on a quitté a Suisse mon père travaillait comme menuisier dans une menuiserie à Nkolbisson, c’était à l’extérieur de Yaoundé. Il gagnait 44000 FCFA. Quand on montre aux gens le quartier où j’ai grandi les gens se disent : « une Blanche n’a pas pu habiter là ! ». Il y avait des inondations quand il pleuvait tout tait inondé », a-t-elle raconté.
Nathalie Yamb a expliqué que son père, connaissant son caractère bien trempé et son esprit révolutionnaire l’avait dissuadé de rentrer travailler comme journaliste au Cameroun après ses études en Allemagne. « J’ai fait des études de sciences politiques, journalisme et après communication à l’époque. Quand je dis que je vais rentrer en Afrique pour voir comment… Mon père m’a dit : « si tu viens ici au Cameroun il ne faut pas que tu deviennes journaliste. Si tu écris on va te mettre en prison à Kondengui tout de suite. Vraiment il faut me promettre que si tu rentres tu ne vas pas être journaliste. Je n’ai pas été journaliste », fait-elle savoir.
Elle rapporte que sa mère la comprenait mieux vu qu’elle a toujours mené des combats depuis son enfance. Sa génitrice est d’ailleurs le personnage de son pays qui l’inspire. Parce qu’elle est « une battante ». C’est, fait-elle savoir, quelqu’un qui a perdu ses parents très tôt, qui a élevé ses enfants dans un pays qui n’est pas le sien, qui a surmonté plusieurs cancers. Une femme aujourd’hui âgée de 73 ans mais mariée depuis 52 ans.
Voici ce que dit Nathalie Yamb parle de la vie politique du Cameroun. Elle n’hésite pas à comparer les comportements et situations en Côte d’Ivoire et chez elle. « J’ai créé un Hashtag il y a quelques années de cela sur Twitter et sur Facebook pour parler du Cameroun dont je suis assez fière. C’était « hashtag pays penché ». Parce que comme dans beaucoup de pays d’Afrique – d’ailleurs ce n’est pas une particularité du Cameroun, malheureusement les mêmes choses se répercutent partout – Il y a un potentiel énorme, une créativité énorme chez les populations. Et puis il y a un système qui a tout pourri. Qui infiltre comme un magma et qui tire tout vers le bas. J’ai beaucoup de regrets pour le Cameroun parce que contrairement à la Côte d’Ivoire, au Cameroun il y a quand même une liberté d’expression qui est assez extraordinaire – je sais qu’il y en a qui pousseront peut-être des cris d’orfraie mais …- il y a plusieurs chaînes de télévisions privées, les gens sont capables d’aller débattre à longueur de journée à la télévision, de s’exprimer dans des termes, certaines fois qui sont peut-être même un peu choquants. Il y a un enrôlement électoral qui est ouvert quasiment toute l’année. En Côte d’Ivoire il y a un enrôlement chaque fois qu’il tombe une dent au président. Il fait des enrôlements de 6 jours… Et quand on a toutes ces possibilités à savoir pouvoir s’exprimer, avoir accès à des médias relativement libres, pouvoir s’enrôler sur la liste électorale et qu’on se retrouve à la fin avec la même chose qu’en Côte d’Ivoire où il n’ y a pas d’enrôlement, on a quand même une liste de 6, 5 millions d’électeurs des deux côtés... En Côte d’Ivoire il y a une seule télé, la RTI. C’est vrai que Monsieur Ouattara vient d’octroyer aux membres de sa famille des licences pour qu’on ait 5 sources d’abrutissement supplémentaires. Parce que ce sera de nouveau de l’atalaku et de la propagande à longueur de journée. Mais que de l’autre côté au Cameroun on a ça et que l’on voit où l’on est arrivé en 2019 avec les gens qui se tapent dessus, de l’ethnicisme, du tribalisme, la sécession, la guerre civile, il y a suffisamment de problèmes. Notre unique ennemi commun partout en Afrique c’est la pauvreté. Il ne faut pas se laisser distraire par des palabres que les gens vont mettre en place ».