Le recrutement de 2000 soldats relance le débat sur ce corps au sein de la haute hiérarchie militaire.
Deux faits, qui ont suscité une certaine joie auprès de plusieurs Camerounais, sont venus en fait remettre au goût du jour, un problème important dans l'armée camerounaise. Le 23 décembre 2013, le ministre délégué à la présidence chargé de la Défense, Edgard Alain Mebe Ngo'o, a lancé des concours de recrutement dans les forces de défense. Ceux-ci offrent 4850 places au total, notamment 400 élèves sous-officiers des armées, 2350 recrues, 300 élèves sous-officiers de gendarmerie et 1800 élèves gendarmes.
Trois semaines plus tard, un autre communiqué du ministre Mebe Ngo'o annonçait un recrutement de 2000 soldats pour le compte de la Garde présidentielle et du Bataillon d'intervention rapide (Bir). Avec une particularité cette fois-ci: les titulaires du Certificat d'études primaires (Cep) pouvaient postuler à ce recrutement. Il y a un moment pourtant que l'armée ne recrutait plus à ce niveau. Comment, en moins d'un mois, le ministre de la Défense a-t-il pu lancer deux recrutements dans l'armée sur des bases si différentes? Pourquoi pour le Bir et la Gp on a dû revenir au Cep, alors que le diplôme minimum requis pour le recrutement dans l'armée et la gendarmerie lancé le 23 décembre dernier est le Brevet d'études du premier cycle (Bepc)? Depuis l'année dernière, pour correspondre aux exigences de rajeunissement et de professionnalisation de la Réforme des Armées de 2001, les soldats étaient recrutés au niveau du Bepc.
Cep ou Bepc
La première lecture faite des deux décisions du ministre de la Défense était la volonté, face aux différentes pressions aux frontières notamment, de renforcer les forces de défense en hommes de troupe. Mais l'on découvrira plus tard que les deux recrutements n'auraient pas suivi le même circuit. Certes, ces décisions sont toutes signées par le Mindef qui, en tant que ministre délégué, a sans doute appliqué des instructions du Président de la République.
Si le premier texte n'a suscité aucune réaction particulière, le second par contre, a apporté le courroux de certains hauts gradés de l'Armée camerounaise, qui s’estiment doublés. Le chef d'état-major des Armées, le général René Claude Meka, l'aurait clairement fait entendre lors d'une réunion qu'il a convoquée le 24 janvier dernier. En présence des commandants de secteurs militaires et des commandants de légions de gendarmerie des dix régions du Cameroun, il se serait indigné du recrutement de soldats au niveau du Cep. Ce qui signifie simplement que le recrutement des 2000 de la Gp et du Bir a été lancé sans que le chef d'état-major des Armées n'ait été consulté. Or, c'est lui qui détermine les besoins de l'Armée camerounaise en effectifs.
Si la décision de recruter 2000 soldats au Bir et à la Gp n'est pas venue du Cerna, qui donc l'a initiée? Les regards se tournent en premier vers le général israélien Mayer Heres, conseiller technique à la présidence de la République, en charge de la formation des unités spéciales et grand patron du Bataillon d'intervention rapide. En décembre 2012, alors qu'il y avait une grogne au sein de la Garde présidentielle, il était venu délivrer un message du Président de la République aux militaires, Il aurait donc toujours l'oreille du Chef de l'Etat qui semble, dans le cadre du dernier recrutement, l'avoir surtout écouté.
En effet, le général israélien traite directement avec le Chef de l'Etat, ce que n'apprécient pas toujours les officiers des forces régulières. Ils estiment que lui qui a un statut de consultant n'est pas la personne indiquée pour déterminer les besoins de la troupe. Pourquoi Paul Biya, en ce moment crucial, a-t-il choisi de faire plus confiance au général israélien qu'aux patrons de l'Armée camerounaise? La sortie du général Meka, le 24 janvier dernier, pourrait apparaître comme un message en direction du Chef de l'Etat.