Dès la première phase de ce nouveau rapport publié ce vendredi 26 février 2021, Human Rights Watch (HRW) lâche le morceau : « Lors d’une attaque commise par des soldats camerounais le 1er mars 2020, au moins 20 femmes – dont quatre femmes handicapées – ont été violées, un homme tué et 35 autres arrêtés ». Une attaque qui s’est déroulée au village d’Ebam, dans le département de la Manyu, région du Sud-Ouest, et constitue selon l’ONG, « l’une des pires perpétrées par l’armée camerounaise ces dernières années ».
HRW dit avoir obtenu des informations en rapport avec cette attaque, au cours de laquelle les soldats camerounais sont également accusés d’avoir incendié une maison, de pillé de nombreuses autres, et infligé des sévices corporels à des hommes embastillés dans cette localité et conduits dans un camp militaire. L’organisme regrette que ce triste événement soit passé inaperçu et que les autorités, bien courant de la situation, n’aient pas mené une enquête pour tenter d’établir les responsabilités.
« Un an plus tard, les survivants de l’attaque d’Ebam ont désespérément besoin de justice et de réparations et sont choqués de voir que ceux qui leur ont fait subir des violences sont libres et que leurs actes sont restés sans conséquence », commente Ida Sawyer, directrice adjointe de la division Afrique à Human Rights Watch.
HRW déclare avoir échangé entre le 1er août et le 5 janvier 2021 avec 20 femmes survivantes de ce viol, quatre hommes arrêtés et passés à tabac, quatre témoins de l’attaque, deux proches de l’homme tué, un médecin qui a examiné les victimes du viol, et deux travailleurs humanitaires, et des responsables de l’Organisation des Nations-Unies (ONU) au courant de cet incident. Et surtout, d’avoir saisi la Présidence de la République du Cameroun, pour besoin d’éclaircissements sur cette affaire, mais n’a pas obtenu un feed-back.
L’ONG enfonce davantage le clou, révélant l’exfiltration de sa cellule à la base militaire de militaire de Besongabang (Sud-Ouest), l’exécution sommaire d’un des 36 hommes arrêtés dans la nuit du 1er mars 2020.
HRW déplore de nombreux crimes attribués à l’armée dans ce conflit armé dans les deux régions anglophones, et regrette à la fois qu’ils restent impunis, à l’exception des massacres de Ngarbuh (Nord-Ouest), perpétrés le 14 février 2020, deux semaines avant l’attaque d’Ebam. L’ONG exige des autorités qu’elles ouvrent une enquête, afin de trouver les responsables et de les traduire en justice. « Les autorités camerounaises devraient mener d’urgence une enquête indépendante sur l’attaque d’Ebam, avec le soutien de l’ONU et de l’Union africaine, et rendre ses conclusions publiques. Garantir justice et réparations sera essentiel pour dissuader de futures attaques et aider les survivantes à surmonter cette épreuve», a conclu Ida Sawyer.