Cameroun: Calixthe Beyala et Jean Jacques Ekindi tirent à boulets rouges sur l’Ambassadeur des Etats-Unis qui a osé conseiller à Paul Biya de quitter le pouvoir.

Par Adeline ATANGANA | Cameroon-Info.Net
YAOUNDE - 19-May-2018 - 23h34   38658                      
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Calixthe Beyala Archives
Les médias du gouvernement qui avaient essayé de masquer le message de Donal Trump sous le titre « Lettre de Félicitions » du président américain à son homologue camerounais pour la célébration de la fête nationale, ouvrent désormais leurs antennes à des critiques acerbes contre Peter Henry Barlerin, l’Ambassadeur américain qui a dévoilé à la presse, les véritables raisons de l’audience que lui a accordée Paul Biya le jeudi 17 mai 2018.

 

 Oui, comme de tradition et à l’instar des pays amis du Cameroun, le président américain a adressé une lettre de félicitations pour la 46e fête nationale du pays des Lions indomptables.

Mais, ce que les médias du gouvernement camerounais n’ont pas dit dans leur compte rendu de l’audience que le président Paul Biya a accordé jeudi 17 mai 2018 à Peter Henry Barlerin, Ambassadeur des Etats-Unis à Yaoundé,  c’est que ce dernier et son hôte ont parlé entre autres sujets, des violations flagrantes des droits de l’homme et autres exactions enregistrées tant du côté du gouvernement que du côté des sécessionnistes dans la guerre qui oppose les forces de défense et de sécurité aux activistes de la crise dans les Régions anglophones du Cameroun, de la nécessité d’un dialogue franc entre les parties en conflit et des prochaines élections présidentielles.

« J’ai suggéré au président qu’il devrait penser à son héritage et la façon dont il veut se souvenir dans les livres d’histoire pour être lus par les générations à venir, et a proposé que Georges Washington et Nelson Mandela soient pour lui d’excellents modèles » a déclare devant la presse, le diplomate américain à la sortie du palais de l’Unité.

Ces propos de Peter Henry Barlerin ont irrité certaines personnalistes camerounaises. Dans une interview diffusée au journal 13h de la radio d’Etat ce samedi 19 mai 2018, Calixthe Beyala, écrivaine engagée, juge déplacés les propos du diplomate américain.

« Une conversation privée avec un chef d’Etat qui vous reçoit en audience, ne doit pas faire l’objet de commentaire et encore moins d’un communiqué de presse. Ce qu’on appelle la réserve diplomate, et là, je crois qu’on est en rupture de réserve. On est dans l’irrespect absolu des conventions internationales en fait. Les Etats-Unis, c’est un pays qui a connu une très longue guerre de sécession et ce pays a utilisé tous les moyens pour pouvoir garder son unité nationale. Ce pays ne peut pas dire au Cameroun de nous diviser en micro-Etats, ce pays ne peut pas féliciter les sécessionnistes, ce pays ne peut pas protéger les sécessionnistes puisque ce pays connait la souffrance que peut reprouver un peuple. Par rapport aux élections camerounaises mais ça ne regarde que les camerounais. S’ils veulent porter à leur tête Paul Biya, c’est leur choix. On n’a pas à nous dire qu’ils ne doivent pas le faire. Les camerounais le feront s ils veuillent, ils ne le feront pas s ils ne le veuillent pas » a répliqué le Grand prix du roman de l’Académie française.

Jean-Jacques Ekindi, ancien ponte du régime Biya, devenu opposant aux débuts des années 90, n’y est pas aussi allé de main morte dans sa réaction contre les déclarations de Peter Henry Barlerin

« Je crois qu’il y a quelque chose de choquant et qui met les patriotes comme moi en colère. Parce que le sentiment que l’on retient est que l’Ambassadeur des Etats-Unis veut s’immiscer dans les affaires intérieures du Cameroun… Ce que nous attendons d’un Ambassadeur, c’est de pourvoir voir avec nos autorités, comment on peut régler les problèmes qui nous sont communs, comment les intérêts de chacun peuvent être préservés. Les affaires intérieures restent intérieures. Si jamais ils ont à les évoquer en tête-à-tête qu’elles restent en tête- à-tête. Elles n’ont pas à être publiées. C’est pour ça que nous avons assimilé cette intrusion quelque peu bizarre à une tentative de d’immixtion dans les affaires intérieures du Cameroun » estime le Coordonnateur général du Mouvement progressiste, parti politique d’opposition.

Par contre, il se trouve aussi un bon nombre de camerounais qui ne sont pas irrités par les propos de l’Ambassadeur américain. Ceux-là estiment qu’après 36 ans de règne et avec un pays au bord du chaos, Paul Biya doit pouvoir encourager l’alternance au sommet de l’Etat.

Auteur:
Adeline ATANGANA
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